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Les impressions du comédien José Garcia

 

Lorsque l'on demande à José Garcia son modèle de comédie, la réponse fuse inévitablement :

AAArA"Louis de Funès, certainement. "Le Tatoué" est ma comédie préférée. Le mec qui voit un Modigliani tatoué dans le dos de l'autre et qui ne pense qu'à le lui découper : j'adorerais pouvoir jouer ça ! De Funès entrain d'expliquer à Gabin qu'on va lui découper la peau, c'est irrésistible…C'est mon film de chevet. Il devrait être récompensé cinq cents fois ! Pourquoi ? C'est, primo, une vision merveilleuse sur l'argent. C'est, ensuite, une bonne histoire et De Funès était le seul à amener le spectateur dans les choses les plus absurdes.

 

Jean Gabin et Louis de Funès dans "Le Tatoué" de Denys de La Patellière (1968)

 

AAArALe talent de Louis De Funès c'est ça : celui de rendre crédibles ces choses les plus absurdes dont on parle justement. Comme dans cette scène de "La grande vadrouille" où il pose sa perruque de chef d'orchestre sur une tête de mannequin avant de planter une aiguille dedans et de hurler aussitôt en se tenant la tête parce qu'il s'est fait mal. Lui seul pouvait jouer quelque chose d'aussi aberrant ! Quand on arrive à faire des trucs aussi débiles, tout en ayant le rôle d'un chef d'orchestre, c'est génial. Sa liberté et sa fantaisie sont extraordinaires. Aujourd'hui, cette liberté fait rêver, plus personne n'en a autant.

AAArAChez De Funès c'est la folie qui domine. Mais il a aussi une rigueur énorme. On sent qu'il ne rit pas de ses propres gags. C'est la première chose que j'ai apprise de lui : être sérieux et croire dur comme fer à ce qu'on fait, même quand on fait n'importe quoi. C'est un des acteurs qui me troublent le plus, notamment quand je fais des comédies et qu'il faut pousser des personnages le plus loin possible. C'est grâce à lui que j'ai joué mon rôle comme je l'ai fait dans "Jet-Set" de Fabien Onteniente. C'était un virtuose.

 

En chef d'orchestre dans "La Grande vadrouille" de Gérard Oury (1966)

 

AAArAEt j'aime aussi cet acteur parce que c'est le premier avec Fernandel que j'ai vu dans mon petit poste de télévision. Ca veut dire aussi jouer avec toute son énergie. Pour lui, la comédie est un combat physique. Il faut tout apporter à la caméra, c'est rarement elle qui va chercher des choses secrètes. Il faut donner le rythme. Quand on termine le tournage d'une comédie, on est comme un gladiateur brisé. Il faut avoir la foi pour le faire et De Funès l'avait.

AAArAJ'aime surtout chez lui la méchanceté. Les personnages de méchants sont souvent réjouissants, comme ceux de la comédie italienne, mais De Funès est sans doute celui qui est allé le plus loin dans ce registre. Il assume les pires défauts de ses personnages avec une sorte de fierté. C'est le principe du clown mais avec son tempérament à lui. Il porte seul les maux de tous les autres. Il devient un exutoire. Moi, je mets toujours une part d'humain dans mes personnages. Lui, il ne veut pas être sympathique. Mais il l'est quand même. C'est fort.

AAArAAu final, je ne pense pas que quelqu'un puisse se poser en digne successeur de Louis de Funès tout simplement parce que les acteurs sont uniques."

 

Propos recueillis par : Frédéric Strauss - Télérama n° 2767 du 25 au 31 janvier 2003, et Alain Grasset - Le Parisien - 27 janvier 2003

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