"Ah les belles bacchantes"

Théâtre et Cinéma, grandeur et décadence

 

AAAIA Il y aurait beaucoup à dire sur la joyeuse troupe de Branquignols créée par Robert Dhéry avec son épouse Colette Brosset et son complice Gérard Calvi. Ne serait-ce déjà parce que peu de choses ont percé et rares sont les extraits vidéos ou photos montrant ses comédiens en action. Si l'INA ou d'autres organismes privés doivent disposer de bandes et d'archives conséquentes, dont quelques extraits ont été diffusés, il est difficilement possible pour le simple particulier de pouvoir se procurer des archives de qualité et de longueur suffisantes. Hormis les objets classiques (33T, photos, affiches de films…), les documents sonores restent problématiques à quantifier. De plus, les comédiens originaux de la troupe étant - hélas ! - pour la plupart décédés, il ne reste que peu de matière à exploiter. Légère frustration donc lorsqu'on sait le succès populaire qu'a rencontré cette troupe dans ses années fastes... et qui semble pourtant aujourd'hui bien oubliée.

AAAIA De Funès ne s'y était d'ailleurs pas trompé et a toujours souhaité intégrer cette troupe familiale, bon enfant, où il se sentait à l'aise. Colette Brosset s'en rappelait d'ailleurs fort bien : "On a rencontré De Funès alors qu'il était encore pianiste. Il jouait chez Gavarny à Pigalle. C'était un merveilleux musicien. On allait souvent boire un demi après le spectacle des Branquignols qu'on venait de créer. Il jouait comme un dieu, il était extraordinaire. Il venait souvent se mettre à notre table entre deux morceaux et nous disait "je voudrais tellement être acteur". Nous en avons parlé à Rocca et il est passé par le cabaret La Tomate, ensuite nous l'avons engagé. Ce fût pour les Belles Bacchantes où il a éclaté. Robert avait écrit ce spectacle pour lui et Jacqueline Maillan qui n'étaient pas très connus à cette époque. Les deux étaient pourtant remarquables ".

 

Colette Brosset et Robert Dhéry en 1962 avec leur fille Catherine (collection F&J)

 

AAAIA Dhéry lui aussi a souvent confié face aux journalistes : "De Funès n'était jamais loin de nous, nous venions souvent l'écouter jouer du piano et comme il nous appréciait, il venait toujours dans un coin pour nous faire quelques blagues dès qu'il avait un moment. Nous l'appréciions beaucoup et un jour il m'a dit qu'il aimerait bien que je lui écrive un spectacle. Je lui ai dit que j'étais d'accord et je lui ai écrit "Ah les belles bacchantes". Pour comprendre la filiation entre Les Branquignols et Louis de Funès, il faut cerner les affinités de cette rencontre. Dhéry et De Funès partageaient le même amour et le même respect des grands acteurs muets, idoles d'une génération aujourd'hui presque disparue auprès des jeunes. Harry Langdon, W.C Fields, Buster Keaton, Charlie Chaplin ou Laurel et Hardy n'avaient plus de secrets pour eux. Bertrand Dicale explique parfaitement cette alchimie : "Le grand désir de Louis de Funès ce sont les Branquignols. Autour de Robert Dhéry et Colette Brosset, couple à la ville et à la scène, une bande de comédiens mélangent un humour potache, leur admiration d'Hellzapoppin, leurs souvenirs des films muets, l'envie de retrouver les légèretés des comédies musicales américaines, une insolence de jeunes gens qui ont traversé la guerre en s'ennuyant. […] La méthode de Dhéry c'est de tout mélanger : le théâtre et le cabaret, la danse et l'humour, la scène et la salle, le réglage méticuleux et l'improvisation. […] Avec Louis de Funès, il partage un amour immodéré de l'observation du quotidien et des personnages absurdes"

 

 

AAAIA Pourtant Louis n'intègre pas de suite la troupe des Branquignols. D'ailleurs beaucoup de spectacles montés par Dhéry au cours de sa carrière se feront sans Louis de Funès. Ainsi, s'il participera à certains de ses films ("La Belle Américaine" ou "Le Petit Baigneur"), les pièces de théâtre "Du-Gu-Du" joué en 1951 au théâtre La Bruyère, "Pommes anglaises " en 1957 au théâtre de Paris et surtout le triomphe international "Les Plumes de ma Tante" se feront sans lui en raison d'une carrière sans cesse grandissante. Pour "Bouboute et Sélection", joué en 1952-53 au cabaret du Vernet, il pense à son ami et l'engage pour un petit rôle. Chaque soir, le public est hilare lorsqu'il entre en scène et présente son costard sur lequel a été renversé du café liégeois. L'étroitesse de la salle rend parfois difficile les représentations mais la proximité des spectateurs confèrent une ambiance plus chaleureuse et les comédiens déploient toute leur énergie pour les contenter. Un problème toutefois se pose : une petite salle ne permet qu'un nombre réduits de spectateurs et les recettes, comme les redistributions aux comédiens sont faibles. Tellement faibles qu'au bout d'une trentaine de représentations (le chiffre exact n'est pas connu) la belle aventure prend fin et chacun repart de son côté.

AAAIA Mais Louis de Funès a gagné la confiance de la troupe et acquis ses premiers gallons. Il sera régulièrement des projets de Dhéry qui pense à lui pour le spectacle dont l'idée est entrain de germer dans sa tête. Avec son habituelle envie de mélanger les genres, les époques et de tourner le tout en dérision et en humour parfois potache, Robert souhaite proposer un rôle d'ampleur à Louis de Funès dans lequel celui-ci pourrait laisser exploser tout son génie. Fini donc les petits rôles de figuration, son "pote" Louis sera mis au premier plan dans sa nouvelle œuvre : "Ah Les Belles Bacchantes" dont les premières répétitions, entamées au début de l'année 1953 au théâtre Daunou, vont confirmer tout le bien qu'il pense de leur nouvel élève. Louis s'implique totalement, avec un professionnalisme rarement égalé pour un comédien encore de seconde zone. Son sens du timing, sa répartie et sa pugnacité à tirer le meilleur du comique à chaque scène plaisent à Dhéry et les deux comédiens passent de longs moment à part à improviser des gags. Prévu uniquement pour trois mois (Louis de Funès et Jacqueline Maillan étaient disponibles durant les mois d'été), le spectacle va finalement tenir le haut de l'affiche pendant plus de deux saisons ! : "Nous l'avons joué 883 fois. C'était une jolie troupe avec de bons sketchs. Le spectacle a très bien marché. Louis est passé de 15 000 francs au cinéma à 150 000 au théâtre". Dans la pièce, Louis apporte ses propres mimiques, ses propres gags ce qui fera dire au réalisateur Jean Chérasse : "C'était un acteur prodigieux qui avait des dons exceptionnels mais qui, malheureusement par manque d'imagination ou par aversion profonde pour le changement, s'est sclérosé. Il a fait des trucs dans mon film "La Vendetta" que vous revoyez dans tous les films qui ont suivi. Les mêmes exactement les mêmes !" . Cette affirmation, certes un peu exagérée n'en est pas moins exacte.

 

De Funès avec Colette Brosset, Caccia et Jacqueline Maillan (www.parisenimages.fr)

 

AAAIA Ainsi dans l'adaptation cinématographique "Ah les belles bacchantes", on retrouve certaines expressions qui feront la gloire de l'acteur : Ainsi le bruit de la poule sera réutilisé pour coincer le braconnier dans le prologue du "Gendarme de Saint-Tropez" tout comme certains rictus haineux dont les traits réapparaitront sur son visage dans plusieurs films. Ainsi sa gestuelle face à Bernard Musson ("Vous êtes chargé de faire une enquête dans un théâtre où se produit des femmes lassives") pour laquelle De Funès manifeste un air désabusé en se frottant un œil sera reproduite dans "La Belle Américaine" ou plus tard dans le sketch des "Veinards". Paul Mauriac écrivit aussi de lui : "Tant qu'il ne renouvellera pas son jeu et n'étendra pas la gamme restreinte de ses expressions, Louis de Funès ne pourra être utilisé au cinéma que pour des créations secondaires." A son crédit toutefois il faut aussi noter que, si ses "mimiques" sont parfois réutilisées, il tente cependant toujours de les réactualiser, d'en apporter une coloration différente. Ainsi, l'affirmation d'Olivier Mongin n'en est pas moins exacte non plus : "La grande affaire du comique est de répéter la même chose sans faire la même chose. Un art où excelle De Funès qui en jazzman accompli joue sur son propre corps d'infinies variations, écartant toute lassitude".

AAAIA Enfin, "Ah les belles bacchantes" demeure un formidable document qui révèle son potentiel de musicien. Ses interprétations au piano ont été trop rarement reproduites au cinéma. Si l'on excepte cette pièce, il reste une fugace apparition dans "Je n'aime que toi" (de Pierre Montazel, 1949) et bien entendu son rôle de compositeur dans "Comme un Cheveu sur la soupe" de Maurice Regamey (1957).

 

 

AAAIA Le tout Paris raffole de la pièce qui se taille rapidement une excellente réputation auprès du public qui chaque soir va applaudir à tout rompre les comédiens sur les planches du théâtre Daunou. La première représentation, en date du 19 juin 1953, est en revanche accueillie par une critique plutôt frileuse de voir tant de femmes nues sur la scène. Certains goûtent néanmoins avec plaisir au spectacle tel Max Favelli : "Dernier miracle, Robert Dhéry a recruté de superbes et a réussi à en faire de superbes comédiennes. Des femmes nues et qui parlent et qui déchainent le rire. Quel merveilleux allié pour les spectateurs de province et de l'étranger qui pourront concilier de la sorte l'exercice de l'esprit et la recherche esthétique ! Logiquement, on doit refuser du monde cet été au Daunou" (Paris Presse, 4 juillet 1953). A noter que peu de journalistes parlent alors du phénomène Louis de Funès. La pièce, tout comme le film plus tard, est réservée à un public averti, en raison de son caractère jugé trop frivole pour un jeune public. Les femmes nues n'étant pas un spectacle pour des yeux encore peu aguerris à ces choses de la vie ! Rien de choquant, de provoquant ou de vulgaire pourtant mais la censure tolérait beaucoup moins de sous entendus qu'aujourd'hui ! De Funès quant à lui, s'il est encore quelque peu boudé par la presse, recueille un nombre de suffrages impressionnants et commence véritablement à se faire un nom important dans le métier. Il prend ses marques et l'on sent qu'il peut s'affirmer comme une valeur sûre, comme le comique de demain prêt à exploser. Bertrand Dicale, dans son excellent livre consacré à l'acteur, évoque son jeu sur les planches : "Outre la danse et le comique visuel, il réussit de grands numéros en solo. Un soir faisant la queue pour aller au cinéma, il avait remarqué le jeu d'une femme qui, écoutant ce que lui racontait son mari, s'exclamait régulièrement "merde ", à chaque fois sur un ton différent. Il en a fait un sketch. Succès. Il recycle un gimmick de Robert Rocca à la radio en lançant à la fin d'une conversation "Et mes hommages à madame votre mère", il prend un air furibard devant des jeunes femmes peu vêtues ; succès, succès encore. Il n'aime pas beaucoup le directeur du théâtre Daunou, René Sancelme. D'abord pour faire rire Dhéry, il imite son accent auvergnat en roulant les "R" et en mâchonnant l'articulation."

 

AIA

 

AAAIA De Funès prend confiance et engrange de l'expérience. Il nourrit son jeu chaque soir, apprend face à des comédiens de valeur aussi égale à lui et se mesure à eux sans tirer la couverture. Il se teste, innove et surtout apprend à capter l'attention du public, à laisser venir le comique sans le forcer, bref à être à l'écoute de son public. Le théâtre est une formidable école de la vie professionnelle, il le sait et prend donc ces opportunités très au sérieux. Malgré ses excellentes prestations au Daunou, l'acteur est encore trop peu utilisé au cinéma mais ses compositions deviennent de plus en longues et s'étoffent. D'un simple figurant, il lance quelques répliques puis participe entièrement à une scène avant d'apparaître plusieurs fois pour des situations comiques auxquelles le public adhère. En clair, il faut être vu et avoir un visage pour lequel les simples badauds puisent sans hésitation coller un nom. De Funès en fait partie et sa participation à un nouveau projet va le confirmer. Le succès triomphal du spectacle de la troupe des Branquignols a donné à Dhéry l'idée de le porter sur grand écran. Afin de conserver l'énergie et l'humour, l'ensemble de la troupe participe au projet avec des compositions diverses. Le film dispose d'un casting de choix : Robert Dhéry, Colette Brosset, Louis de Funès, Jacques Legras, Jacques Jouanneau, Raymond Bussières, Roselyne Luguet, Bernard Musson, Francis Blanche, Michel Serrault, Mario David…De la qualité et surtout une bande de copains aussi bien au niveau professionnel qu'à la vie. Afin de diriger au mieux sa troupe et de se focaliser sur la recherche de gags comiques, Dhéry va abandonner le "management" du film au profit de Jean Loubignac, réalisateur oublié dont la filmographie bien mince peut laisser songeur...

AAAIA Et en effet le résultat est à hauteur des craintes : Tentant tant bien que mal de préserver le "beau" des scènes théâtrales, le film, décomposé en tableaux, est une suite de gags difficiles dont on peine à retrouver l'univers des Branquignols. Exit le regard complice que l'on peut observer dans les films de Dhéry. Pourtant même Gérard Calvi est mis à contribution afin de préserver la fraîcheur comique de la bande : "Je me rappelle très bien de mes discussions avec Loubignac où nous discutions de l'orientation du film. Il me disait "je vais faire cela comme ça" ce à quoi je lui répondais "peut-être pourrions nous faire comme ceci" et il me retournait "tu as raison c'est une bonne idée." Bref, l'échange était constructif. C'était une époque où le musicien participait encore pleinement à la créativité du film".

 

 

AAAIA De Funès incarne le rôle de Michel Lebœuf patron de la brigade des mœurs. Hélas pour le public, il est bien pâle face aux prestations qu'il pouvait exécuter sur les planches, la faute au format court des films qui réduisent considérablement le champ d'action de la veine comique. Lui l'agité, exerçant milles facéties face au public se retrouve quelque peu coincé face à une caméra fixe dans ce rôle qui demanderait beaucoup plus d'ampleur et d'ouverture. De plus, la géographie restreinte de film, puisque tout se déroule dans une pièce, fait inévitablement perdre du rythme aux comédiens. Plus grave encore on ne voit plus ce rythme si particulier au format théâtre. Chaque scène s'entrecoupe mal et certaines transitions restent très dégrossies. Collette Brosset ne cachait d'ailleurs pas sa déception : "La technique nous gênait beaucoup. On était tellement habitué à notre scène bourrée de monde. Le réalisateur ne voulait pas faire ce que nous faisions au théâtre. Oui cela nous a vraiment gênés". Certains acteurs tirent mieux leur épingle du jeu. Ainsi Raymond Bussières est excellent dans son rôle de plombier jaloux. Son face à face d'avec Dhéry pour le replacement des tuyaux est l'une des toutes meilleures scènes du film. Colette Brosset et Jacqueline Maillan sont très peu présentes à l'écran…un vrai regret ! Roger Caccia quant à lui est toujours aussi génial lors de ses apparitions et Jacques Legras dispose de quelques scénettes pittoresques même si son comique ne peut prendre véritablement toute son ampleur (dur de faire rire pour chaque prestation de tableaux de 10 secondes).

 

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Deux scènes qui révèlent les caractères loufoque et baroque de Robert Dhéry

 

AAAIA A l'évidence, la critique elle aussi n'est pas tendre face à ce four cinématographique. Ainsi le célèbre journaliste Claude Mauriac s'en expliquait dans les colonnes du Figaro littéraire le 29 octobre 1954 : "J'avais aimé le spectacle de Robert Dhéry d'où a été tirée cette adaptation : le burlesque s'y manifestait avec désinvolture et fraicheur. La première qualité de la pièce était un rythme qui a disparu du film. Le style de cette troupe s'accommode mal du jeu cinématographique. Le meilleur de ses interprètes, Louis de Funès, perd au cinéma une partie de sa drôlerie. Ses tics l'y desservent ; il manque de sobriété ; les grossissements utiles à la scène apparaissent ici sans objet : bref il est monotone". D'autres attribuent même des notes au gré de leur ressenti. Ainsi Olivier Mongin, critique cinéma rend un sévère 3/20 et s'en justifie : "A l'époque, les Branquignols étaient assez connus, mais pas De Funès, qui n'avait pas encore de rôles faits pour lui. Ah ! Les Belles Bacchantes est un film dont le succès sera assez fort à sa sortie, mais c'est aussi et surtout un beau navet, très kitsch et vieillot désormais. C'est assez plat, souvent ridicule, on ne rit pas très souvent (ce qui est un comble pour une comédie prétendument burlesque : ici, les gags sont franchement moyens), les acteurs ne sont pas terribles (pourtant, il y a des pointures : Maillan, Blanche, Serrault, Dhéry, Brosset, Fufu), la réalisation, insignifiante. Bref, on l'aura compris, mieux vaut se passer du visionnage de ce film, à moins d'être un inconditionnel absolu des Branquignols et/ou de Louis De Funès." Les chiffres aussi parlent d'eux-mêmes. La première du film, en date du 15 octobre, ne sera tiendra que dans le seul cinéma de l'Astor. A la fin de sept pénibles semaines d'exploitation, il dépassera toute juste la barre des 70 000 entrées. Dérisoire lorsque l'on connait le succès qu'a rencontré la pièce une année plus tôt. En province en revanche les salles sont plus remplies : 25 500 entrées à Marseille, 19 000 à Lille, 18 000 à Bordeaux , 13 000 à Lyon, 9 000 à Toulouse. Le film est pourtant tourné en couleur malgré un budget très serré où tout est mis en boîte au théâtre de Suresnes.

AAAIA Il serait faux de considérer que le début de la carrière de "star" de Louis de Funès débute à partir de ce film. Sa prestation de "La traversée de Paris" reste bien plus convaincante. Il est très bon en Leboeuf, il est excellent en Jambier. Le premier aura peut être servi, en partie, de rampe lancement et en fait l'un des premiers classiques de Louis de Funès. Même si le film reste une déception, tout n'est pas mauvais. La bonhomie des comédiens de la troupe reste palpable. Mention spéciale à Michel Serrault pour sa toute première apparition cinématographique.

Louis de Funès, Colete Brosset et Robert Dhéry en 1962 dans "La Grosse Valse" (collection F&J)

 

AAAIA Jean Loubignac lui-même conclut à propos de Louis : "Beaucoup de talent avec le souci de bien faire son métier. C'est lui qui avait trouvé le cri de la poule dès qu'il flairait une bonne affaire…S'il pouvait disposer d'une totale liberté, il la prenait volontiers, mais certains collègues dans le métier l'employaient sans promouvoir ou vouloir lui donner cette liberté de manœuvre. Je l'avais dirigé au cabaret La Tomate dirigée par Robert Rocca où il jouait admirablement son numéro au piano. Il trouva un créneau dans son emploi du temps déjà bien sollicité. Toutefois il y a eu un clash un jour sur le tournage. En effet Mme de Funès était souvent sur le plateau lors des prises de vues. Or, à chaque fois qu'on arrêtait, Louis se tournait vers sa femme pour lui demander : "Ca va ? J'ai été bon ?" . Et ces scènes duraient depuis des jours. Et ce qui devait arriver arriva : j'explose en regardant Mme de Funès : "Madame qui est metteur en scène ici ? Vous ou moi ?" Finalement tout est rentré dans l'ordre. Je dois dire qu'à l'époque du film, certains amis me déconseillaient de prendre De Funès pour lui confier un rôle aussi important puisqu'on le voit presque tout au long du film. On me disait qu'il n'était pas assez connu et moi je répondais : il faut bien un commencement sinon il ne sera pas plus connu que ce qu'il est ! Finalement le résultat a été sans appel ! Par la suite Louis de Funès a grimpé tout en haut de l'affiche. J'étais très heureux pour lui, mais personnellement, je trouvais qu'il en faisait trop dans la gestuelle et les mimiques trop accentuées. Cela ne l'a pas gâté en tous les cas aux yeux des spectateurs qui l'apprécient peut être plus aujourd'hui que dans les années 50 ".

 

Crédits :

- Témoignages de Gérard Calvi et Colette Brosset : DVD Canal +, Bonus Histoires de tournage Olivier Mongin, "Eclats de Rire - Un essai sur les comiques".
- Témoignage de Jean Chérasse : "Louis de Funès" par Eric Leguèbe.
- Critiques des journalistes Max Favelli et Paul Mauriac, anecdotes du spectacle "Ah les belles bacchantes" et chiffres d'exploitation du film sur Paris et en province : extraits du livre "De Funès - Grimaces et gloires" de Bertrand Dicale.
- Témoignage de Jean Loubignac : "Louis de Funès, le sublime anti-héros du cinéma français" de Pascal Djemaa.
- Une autre critique du film : www.cinemadolivier.canalblog.com
- Photos d'exploitation tirées du DVD Canal + "Ah les belles bacchantes" sauf mention particulière collection F&J.

 

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