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Hubert de LAPPARENT

 

AZERTYUIDConstituée d'une cinquantaine de pièces de théâtre et d'une centaine de films, la carrière du comédien Hubert de Lapparent s'avère bien remplie. Fils du célèbre paléontologiste Albert-Félix de Lapparent, il tourna notamment dans la série d'Arsène Lupin (" Les aventures d' Arsène Lupin " de Jacques Becker, " Signé Arsène Lupin " d' Yves Robert et " Arsène Lupin contre Arsène Lupin " d' Edouard Molinaro). Il travailla également sous la réalisation de grands cinéastes comme Ralph Abib (" Les hommes en blanc ", 1955), René Clément (" Gervaise ", 1956), mais aussi Claude Autant-Lara, Jean Delannoy, Guy Lefranc...Enfin, les cinéphiles revoient avec plaisir cet acteur dans les excellents films populaires " Les Patates " et " Un idiot à Paris ". Mais cet acteur très sympathique a également travaillé à plus de 3000 émissions de radio, diffusées sur France Inter, France Culture, Europe 1 ou encore Radio Luxembourg (aujourd'hui RTL). Aujourd'hui, Hubert de Lapparent nous livre ses impressions et ses souvenirs sur Louis de Funès, avec qui il n'a jamais eu de scène à partager. Ils partagent toutefois les affiches de " Sans laisser d'adresse ", "Agence matrimoniale" et " Papa, maman, ma femme et moi " de Jean-Paul Le Chanois, " La traversée de Paris " de Claude Autant-Lara et " Fantômas contre Scotland Yard " de André Hunebelle.

 

Hubert de Lapparent dans "La traversée de Paris", de Claude Autant-Lara, 1956

 

 

Interview de Hubert de Lapparent du 15 décembre 2007 par Franck et Jérôme

 

- M. Lapparent, vous avez débuté en 1948 dans " Manon " de Henri Georges Clouzot, comment en êtes-vous arrivé au cinéma ?

- C'est une longue histoire. J'ai débuté avant la Guerre au conservatoire de Strasbourg, jusqu'en 1939, lorsque je fus mobilisé. A la libération, je vivais comme je pouvais, notamment au théâtre. J'avais comme professeur Gabriel Fontan. Il se trouve que le producteur de " Manon " était Paul-Edmond Decharme que mon père connaissait de longue date. Tous les deux, ils avaient notamment fait un voyage dans le Sahara. Decharme me présenta à Henri Georges Clouzot qui me donna un petit rôle.

 

- Dans les années 1950 vous jouez dans " Sans laisser d'adresse " et " Agence matrimoniale " de Jean-Paul Le Chanois avec Bernard Blier, puis dans " Papa, maman, ma femme et moi " ou encore " La traversée de Paris ". Louis de Funès tient de petits rôles dans ces films. Est-ce à cette occasion que vous l'avez rencontré ?

- Non, je ne l'ai pas vu au cours de tous ces tournages, mais je le connaissais déjà. J'ai rencontré Louis de Funès vers 1953, dans un sketch diffusé à la télévision. Je jouais Charles VII et Lorenzi interprétait Jeanne d'Arc. Louis de Funès avait un petit rôle, il campait un marchand essayant de vendre du tissu - ou quelque chose dans ce genre - à Jeanne d'Arc.

 

- Quels souvenirs avez-vous de " La Traversée de Paris ", aux côtés de deux monstres du cinéma français ?

- Pas beaucoup. Cela s'explique par le fait que Jean Gabin et Bourvil ne figuraient pas sur le plateau lorsque j'ai tourné ! Je me suis retrouvé sur ce film de Autant-Lara, que je connaissais très bien, parce que j'avais eu un rôle dans " Gervaise " (de René Clément, 1955), qui avait été produit par Jean Darvey. Ce dernier avait apprécié ma prestation et me voulait sur " La traversée de Paris ".

 

- Vous avez vu Louis de Funès sur des plateaux de tournage ? Sur " Fantômas contre Scotland-Yard " par exemple ?

- Non, pas même à cette occasion. Louis de Funès, je le connaissais, on se croisait parfois. Nous nous tutoyions car nous nous appréciions, mais n'avons jamais vraiment travaillé ensemble. Toutefois, je me souviens de lui dans " Le Journal " de Jules Renard, avec Jean Carmet, il était remarquable dans cette pièce ! Louis de Funès était étonnant à ses débuts. Ensuite, il a fait une grande carrière cinématographique, qui n'eut pas que de bons films d'ailleurs. Je trouve qu'il en faisait un peu trop dans certains cas. Mais il fut tout de même un très bon comédien ! Pour " Fantômas contre Scotland Yard " j'ai eu un petit rôle imposé par André Hunebelle qui me voulait [ndlr : Richard, l'un des milliardaires taxés par Fantômas et retrouvé pendu dans la chambre du commissaire Juve] qui ne me plaisait guère mais qui était bien payé.

 

- Lorsque l'on résume votre carrière, l'on se rend compte que vous avez joué tous les styles, du comique au tragique. Vous avez joué dans de très grands films comme " Paris brûle-t-il " et " Le jour et l'heure " de René Clément, " L'armée des ombres " de Jean-Pierre Melville ou encore " L'affaire Dominici " de Claude Bernard-Aubert. Avez-vous toutefois, après une carrière bien remplie, des regrets ?

- J'ai fait une carrière convenable, même si j'ai également joué dans de mauvais films, ne nous le cachons pas (rires) ! En 1991, j'ai été victime d'un accident oculaire qui m'a forcé à arrêter prématurément ma carrière. Je ne pouvais plus non plus m'adonner à ma passion : la sculpture. Là est mon principal regret. Peu avant j'avais tourné un an dans une série américaine qui s'appelait " Riviera ". La production voulait absolument tourner en France, mais le résultat ne fut vraiment pas terrible. Les doublages, que les comédiens français assuraient, furent ratés. Mais je dois dire que je ne parle pas très bien l'anglais.

 

- De quels films vous parle-t-on aujourd'hui ?

- Essentiellement de " Gervaise " et de " L'eau vive ", où j'avais de beaux rôles. Dans le second, nous tournions à Aix-en-Provence et fréquentions Jean Giono. Néanmoins, l'on me rappelle plus aujourd'hui ma carrière théâtrale car j'ai joué dans une cinquantaine de pièces. J'ai joué 150 fois avec Bernard Blier sur les planches. Je connaissais bien cet acteur formidable. Il n'était pas toujours très sympa dans la vie, c'est vrai, mais je me suis toujours très bien entendu avec lui. J'ai fait énormément de radio également, en assurant des émissions pendant dix ans sur France Inter. Nous étions toute une bande de copains, c'est un bon souvenir. En revanche, même si nos émissions semblaient - à l'oreille - être de l'improvisation, cela était faux. Nous enregistrions en une journée toutes les séances de la semaine. Tout se fait encore comme cela aujourd'hui.

 

- Pour terminer sur une note comique, pourriez-vous nous évoquer vos souvenirs concernant deux bons films bien connus, à savoir " Les Patates " et " Un idiot à Paris " ?

- Ce sont encore deux bons souvenirs. Pour " Les Patates ", je retrouvais Claude Autant-Lara, mais aussi Pierre Perret, Pascal Roberts et surtout Henri Virlojeux. Nous nous connaissions tous très bien car nous avions déjà travaillé ensemble. Nous avions tourné dans les Ardennes, en juillet et en août, mais je me rappelle que nous mourrions tous de froid ! Dans " Un idiot à Paris ", je trouve que Jean Lefebvre n'a jamais été aussi bon. C'est un très bon film de Serge Korber. Et j'en garde un bon souvenir car je retrouvais une fois encore Bernard Blier.

 

Jean-Roger Caussimon, Henri Serre, Hubert de Lapparent et Antoine Baud
dans "Fantômas contre Scotland-Yard" (André Hunebelle, 1967)

 

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