Yves Barsacq dans "Le Tatoué" de Denys de La Patellière (1968)

 

Yves BARSACQ

 

dfghjhgfdsYves Barsacq, second rôle au visage que tous les cinéphiles reconnaissent immédiatement lorsqu'il parait à l'écran, a très bien connu Louis de Funès. Il fut en effet engagé dans "Le diable et les dix Commandements" (Julien Duvivier, 1962), "Pouic Pouic" (Jean Girault, 1963), "Des Pissenlits par la racine" (Georges Lautner, 1963), "Le Gendarme se Marie" (Jean Girault, 1968), "Le Tatoué" (Denys de La Patellière, 1968) et "Le Gendarme en balade" (Jean Girault, 1970). Preuve de son talent, Yves Barsacq a aussi côtoyé tous les plus grands, comme vous le constaterez... Son physique lui permet aussi bien de jouer le "bon copain" que le flic véreux, le français moyen ou le sénateur-maire, le salaud ou le commercial de province très comme il faut... Qui ne souvient pas de ses coups de sang qui ont donné des répliques cultes ? "Pellot !" dans "Le Tatoué" ou " Merde ! Patate !" dans "Le Gendarme se Marie". Et au total, sa silhouette apparaît dans plus de 170 films !! Depuis quelques années, il se consacrait au doublage de films et de dessins animés. Il donna entre autres sa voix à l'un des deux Dupondt dans "Les Aventures de Tintin" ou au grand-père de "Cédric". En 2007, nous avions chaleureusement remercié Yves Barsacq pour sa disponibilité car il fut l'un des premiers à répondre favorablement à notre requête. Depuis, nous étions occasionnellement en contact avec lui. Il nous a quittés en octobre 2015.

 


Compilation de doublages réalisés par le comédien Yves Barsacq

 

Interview du 22 janvier 2007 réalisée par Franck et Jérôme

 

- Quelles relations entreteniez vous avec Louis de Funès ?

- Je n'ai jamais eu la chance de tourner de grands rôles avec lui, mais j'ai toujours eu d'excellents rapports avec Louis. Une anecdote marquante est celle du "Tatoué" : je jouais un postier et j'étais seul avec lui dans cette scène. J'avais une réplique à lui donner et Louis a insisté auprès du réalisateur en disant "C'est la réplique pour Yves, il faut le mettre au premier plan". Bien entendu, Louis ne jouait jamais le même texte, il changeait toujours et il fallait improviser. Moi j'aimais bien et donc on avait de très bons rapports, il était très sympa. Il était capable d'apporter de la qualité à des films médiocres, il avait un vrai sens du comique, il avait la "vis comica".

 

- Avez vous apporté des gags ou des modifications du scénario dans les films ?

- Non il n'y avait pas d'improvisations, je jouais de trop courtes répliques pour pouvoir le faire. Je jouais mon texte. Quand une scène était plus développée, Louis changeait toujours, moi j'aimais bien l'impro, ça ne m'a jamais dérangé.

 

- Quels sont vos souvenirs de Louis sur le plateau ? Y a t-il eu des coups de gueules ? Des compliments ?

- Il y a peut être eu des coups de gueules mais moi je n'en ai jamais entendu en tout cas. Louis était très proche des techniciens. Sur "Le Tatoué", il y avait une grande table et tout le monde déjeunait ensemble : Louis, les acteurs, les techniciens. En revanche il était plus stricte sur les questions d'organisation : l'heure du maquillage, l'arrivée des comédiens sur le plateau, il était très professionnel.

 

- Vous avez connu Louis au début de sa carrière, lorsqu'il n'était pas encore une star puis vous l'avez côtoyé quand il était numéro 1 français notamment sur les "Gendarmes" ou "Le Tatoué", avait-il changé ?

- Il n'avait pas changé, il était toujours très simple. Il était dur mais jamais avec les comédiens, mais c'est vrai qu'il était plus strict concernant la régie ou la production par exemple. Quand il a été malade, il ne pouvait plus jouer du De Funès. Sur certaines scènes dans des films, je voyais qu'il se retenait un peu, il ne pouvait plus jouer comme avant sous 100 000 volts.

 

Dans "Le Gendarme se marie" de Jean Girault, 1968.

 

- Vous avez joué avec les plus grands: Blier, Gabin, Ventura, Serrault, Bourvil...quel bilan en dressez-vous ?

- J'ai "servi la soupe" à plus de cent vedettes : Bardot, Feuillère, Ventura dans "Le Gorille vous salue bien", c'est le seul qu'il ait fait, après ils ont pris Hanin et c'était quand même moins le personnage parfois. Lino était sympa à cette époque, il n'était pas encore une grosse vedette. Il était parfois renfermé et triste (je pense à cause du handicap de sa fille). Il n'avait pas eu de formation d'acteur mais cela ne l'a pas empêché de devenir un très grand acteur quand même, il était catcheur mais n'aimait pas ce terme, il voulait que l'on dise qu'il était lutteur.

 

- Vos débuts remontent à 1957 dans "Charmants Garçons"...

- J'ai même joué dans un autre film avant. J'ai commencé par être technicien. J'ai fait l'école Louis Lumière. j'ai été deuxième assistant prise de vue et là j'ai connu beaucoup de techniciens. C'était très dur de percer à l'époque. J'ai pris aussi des cours d'art dramatique. Après 3 ans de cours, j'ai commencé à tourner un peu grâce aux gens que j'ai connus. Mais aujourd'hui, je ne connais plus personne. Les réalisateurs ne connaissent plus les seconds rôles de ma génération. J'ai commencé à tourner au cinéma en 1957 dans "Un amour de poche" de Kast avec Jean-Claude Brialy.

 

- Revenons à Louis de Funès, on a souvent dit qu'il devenait vraiment bon à la sixième ou septième prise, contrairement à d'autres qui perdaient leur fraîcheur en face de lui, comment cela se passait avec vous ?

- Le problème est que Louis de Funès tournait toujours plusieurs prises et, contrairement à ce qu'on a pu dire, il était bon dès la première prise. Puis il améliorait aux prises suivantes, allant jusqu'à changer les répliques et il fallait donc improviser pour répondre à ses changements de texte.

 

Louis de Funès et Yves Barsacq dans "Le Tatoué" de Denys de La Patellière (1968)

 

- Oui, on évoque souvent le problème de Bourvil et De Funès concernant le nombre de prises, notamment sur "Le Corniaud" ?

- Gérard Oury avait compris qu'il fallait éviter d'avoir trop de scènes entre eux deux, c'était subtil de ne pas toujours les mettre ensemble car ils se neutralisaient. Bourvil était un acteur d'instinct pur ! De Funès était bon en tragique aussi. Gabin était moins à l'aise dans le comique. Gabin disait "Bourvil, c'est notre maître à tous", c'est tout vous dire pour résumer le génie de Bourvil.

 

- Justement vous : plutôt comique ou tragique ?

- Oh, vous savez, certains metteurs en scène me voyaient et me voulaient uniquement pour jouer des ordures et pour faire du tragique et d'autres juste en comique, en brave cocu. Moi ça ne me dérangeait pas de changer, je pouvais jouer de grosses salopes comme des mecs gentils.

 

- Et sur le plan privé, étiez-vous en relation avec Louis ?

- En dehors des plateaux, Louis avait sa vie, je ne le voyais pas. Je l'ai côtoyé au niveau professionnel. Dans la vie il était un peu triste, c'est d'ailleurs le mythe du clown triste mais attention je ne dis pas qu'il ne plaisantait jamais ! Il pouvait être dans la vie encore plus drôle que dans ses films.

 

Louis de Funès et Yves Barsacq avec Jean Claude Brialy dans "Le Diable et les dix commandements" de Julien Duvivier en 1961.

 

Page créée le 6 octobre 2007, mise à jour le 15 octobre 2015

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