Raoul DELFOSSE

 

 

aaaaaza "Un grand costaud ici, j'en connais qu'un, c'est moi !", "Non pas vous, c'est mon p'tit filleul qui va conduire !" ou encore "Et toi rappelle toi ce que je t'ai dis : dans la salle, le mur !"... Quelques phrases qui nous évoquent immédiatement Louis de Funès face à l'excellent comédien Raoul Delfosse. Le seul qui, chez Septime, arrive "à créer des complexes" au tyranique et redouté patron de l'établissement ! Ce comédien n'a donné qu'une fois la réplique à Louis de Funès, au cours du tournage du "Grand Restaurant". Dommage, car un nouveau face-à-face aurait très probablement été merveilleux et follement drôle, ne serait-ce que le temps d'une petite scène... En 2007, Raoul Delfosse gardait un bon souvenir de ce tournage. Disponible et sympathique, ce brillant comédien, que l'on retrouve également dans "Paris brûle-t-il ?" ou en amusant soldat allemand dans "Le Cerveau" de Gérard Oury, nous a quittés le 27 novembre 2009.

 

 

Interview de Raoul Delfosse du 23 mai 2007 par Franck et Jerôme

 

- M. Delfosse, pouvez-vous nous décrire vos relations avec Louis de Funès ?

- Je n'ai tourné qu'un film avec lui, c'était "Le Grand Restaurant" dans lequel il y avait son fils Olivier qui jouait mon filleul. Je le connaissais d'avant car il a été longtemps pianiste avant de devenir acteur, même si - à cette époque - il n'était pas connu. Il avait aussi de très bonnes relations avec la troupe des Branquignols et notamment Robert Dhéry ou Christian Duvaleix. On se voyait donc de temps en temps. Je me rappelle que sur le plateau, outre son fils, sa femme était tout le temps présente aussi. Il y avait Monsieur Ledoyen, le cuisinier, qui préparait les repas pour les acteurs, je le revois demandant: "Mr. de Funès, que voulez vous manger aujourd'hui ?" et Louis qui aimait les bons repas prenait du homard thermidor par exemple. Etant donné qu'il m'appréciait, il me demandait de rester déjeuner à ses côtés et résultat : j'ai pris cinq kilos durant le tournage (rires) !

 

Raoul Delfosse et Louis de Funès dans "Le Grand restaurant" de Jacques Besnard (1966)

 

- Quelle était l'ambiance sur le plateau ?

- Oh elle était très bien, c'était très marrant.

 

- Il y a une très grande distribution dans ce film avec notamment Noël Roquevert, Jacques Dynam, Grosso et Modo, Roger Caccia, Robert Destain, Jean Droze... avez-vous senti ce besoin pour Louis d'être entouré de sa famille de cinéma ?

- Ah oui, il en avait toujours besoin et cela allait même jusqu'à sa femme qui était toujours présente sur le plateau.

 

- Dans quel état d'esprit Louis abordait-il une scène, il était tendu ou plutôt concentré ?

- Il était extrêment nerveux. Vous savez, Louis était quelqu'un de très anxieux. Je me souviens qu'il avait mauvaise foi. Pour une scène, il devait me taper sur les mains en disant "touchez pas à ça" : lors de la première scène, le fou rire nous gagne, on la refait et le fou rire nous reprend, cela devenait nerveux et à partir de là il n'y avait plus rien à faire. A la quatrième prise, le fou rire étant toujours présent, Louis me prend à part et nous nous mettons dans un coin du studio pour la répéter tranquillement. On revient par la suite pour la refaire et je ne sais pas si c'est l'expression de nos visages ou la proximité physique avec Louis qui me tapait qui fît que le fou rire repartit de plus belle entre nous. Louis se tourna alors vers le metteur en scène et lui dit en parlant de moi "il me fait rire !"

 

- Justement parlons de Jacques Besnard, comment dirigeait-il ses comédiens sur le plateau ?

- C'était quelqu'un de très calme, professionnel mais aussi extrement gentil. il savait ce qu'il voulait et c'était donc facile de se laisser diriger.

 

- Y'a t-il eu beaucoup d'improvisations ?

- Oh oui tout le temps bien sûr, cela vaut pour tous les films comiques. On laisse faire le comédien et lorsque cela ne colle plus on lui dit "non". C'est pourquoi dans ce cas précis, Besnard laissait faire Louis. Il y a donc eu quelques improvisations pendant "Le grand Restaurant", parfois on trouvait un petit gag.

 

- Vous en avez proposé ?

- Oui quelques uns. Car avec Louis c'était facile. La plus grande improvisation est lorsque que Louis vient engueuler son fils et j'arrive derrière pour défendre mon petit filleul. Là, l'improvisation débute, "vous êtes pas content de mon petit filleul", "ah c'est votre petit filleul ? ", "oui c'est le p'tit à Louise", "ah...un peu la même tête...ça va Louise ?", "Très bien" "et vous ça va ?", "Très très bien, beaucoup trop de monde dans cette cuisine vous ne trouvez pas ?"

 

- L'improvisation ne vous dérangeait donc pas ?

- Oh non pas du tout, je viens du cabaret, c'était donc facile.

 

- Comment se comportait-il avec son fils ? Il lui donnait beaucoup de conseils ?

- Rien du tout, il laissait le metteur en scène le diriger complètement. C'est là que l'on reconnait le professionnalisme de Louis. Il intervenait peut être ensuite chez lui pour le conseiller mais en aucun cas sur le plateau et c'était tout à fait ce qu'il fallait faire.

 

Raoul Delfosse avec Louis et Olivier De Funès dans "Le Grand Restaurant"

 

- Et avec les autres comédiens ?

- Ce n'était pas quelqu'un qui était d'un abord facile quand on ne le connaissait pas, il était un peu dans sa bulle.

 

- Ses relations avec les techniciens ?

- Il avait de très bonnes relations avec eux. Il était toujours à l'heure, toujours poli et scrupuleux, un vrai professionnel.

 

- Vous étiez pésent lors de la scène du ballet, réglé par Colette Brosset ?

- Non je n'y étais pas, je l'ai vu pour la première fois lors de la projection. Je n'étais pas toujours là, j'ai fait un peu plus de deux semaines de tournage. Louis par contre était toujours présent, même lorsqu'il jouait des scènes l'après-midi, il était déjà présent le matin.

 

Raoul Delfosse avec Jean-Pierre Marielle et Jean-Paul Belmondo dans "Week-end à Zuydcoote" de Henri Verneuil (1964)

 

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