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Nicole COURCEL

 

AAAAAAA Nicole Courcel est l'une des dernières grandes actrices que l'Age d'Or du cinéma français a comptées. L'élégance, le charme et le raffinement caractérisent la comédienne. Après le Cours Simon, elle est remarquée par Jacques Becker qui la fait débuter au cinéma en 1947, et lui offrira son premier grand rôle au cinéma dans "Rendez-vous de juillet". Elle prendra à la scène le nom de famille de son personnage, et devient « Nicole Courcel ». Elle tournera ensuite aux côtés de Jean Gabin et devient une des vedettes du cinéma français des années 50 et 60. En 1954, elle rencontre un grand succès avec "Papa Maman la bonne et moi" de Jean-Paul Le Chanois, qui connaitra une suite l'année suivante. A cette occasion, elle devait rencontrer Robert Lamoureux et... Louis de Funès. Dans les années 1970, la télévision lui propose de beaux rôles comme celui d'Agnès dans "Les Boussardel" de René Lucot, "Madame Bovary" de Pierre Cardinal, "Credo" de Jacques Deray ou la série "Les Thibault". Elle apparait également avec Lino Ventura dans "L'Aventure c'est l'aventure" et "La Gifle" de Claude Pinoteau. Enfin, on la voit au théâtre comme dans "Good Bye Charlie" de George Axelrod. Elle est la mère de l'animatrice de télévision Julie Andrieu et a publié aux Éditions Robert Laffont en 1980 "Julie tempête", un recueil de souvenirs dédié à sa fille. Un grand merci à cette grande actrice, très sympathique, qui nous relate ses souvenirs sur Louis de Funès et Lino Ventura.

 

Avec Fernand Ledoux et Louis de Funès dans "Papa, Maman, la bonne et moi" de Jean-Paul Le Chanois (1954)

 

 

Interview de Nicole Courcel du 17 avril 2010 par Franck et Jérôme

 

- Mme Courcel, pouvez-vous nous parler de vos débuts cinématographiques ?

- Beaucoup de filmographies m'ont crédité dans "Antoine et Antoinette" de Jean Becker mais il s'agit d'une erreur je n'apparais pas dans ce film. A cette époque ma mère a vu une annonce dans Le Figaro qui disait que Becker recherchait des inconnus pour tourner dans son nouveau film. Elle ne le connaissait pas du tout et moi uniquement très peu. Je suis allé faire des essais et j'ai rapidement voulu partir mais on m'a demandé de rester jusqu'à la fin. J'ai attendu longtemps sans avoir de réponse et six mois après alors que j'étais au Cours Simon, l'agent de Becker m'a retrouvé pour son nouveau film. Il m'a demandé si j'avais déjà fait de la comédie avant et je lui ai répondu non. J'ai à nouveau fait des essais, nous nous sommes retrouvés à trois pour décrocher le rôle de "Rendez vous de Juillet" dont une fille du nom de Normand. Le rôle était celui d'une mauvaise fille qui couchait. Je l'ai décroché et cette composition m'a d'ailleurs amené à " La Marie du port " de Marcel Carné. A cette époque je ne pensais vraiment pas faire carrière, je faisais cela pour m'amuser, nous allions dans les caves avec Gréco, on faisait la fête et on rentrait à quatre heures du matin. Je souhaitais vraiment décrocher ce rôle et je suis allé voir Carné pour lui demander de m'engager mais il avait déjà des vues sur Anouck Aimé qui avait un physique qui lui convenait mieux pour le rôle. J'ai insisté et j'ai finalement obtenu le rôle. Je me rappelle de Gabin qui m'avait un peu pris sous sa protection face à Carné qui était méchant avec moi. Lorsque je finissais une scène, il me disait très froidement que ça allait et Gabin me faisait discrètement un signe avec le pouce en haut pour me dire que tout allait bien !

 

- En 1954, vous tournez dans " Papa, Maman la Bonne et moi ", comment avez-vous été engagé sur ce film ?

- Je ne m'en rappelle plus, sans doute je crois via mon imprésario qui à l'époque était l'un des plus talentueux. Il m'avait dit "J'aimerais vous voir jouer un rôle de gentille dans un film style Le Chanois" qui connaissait déjà très bien Lamoureux. A cette époque j'avais bonne presse grâce à "La Marie du port", j'avais tout ramassé donc cela n'a pas été trop compliqué. Jean Paul Le Chanois était délicieux sur le plateau, il aimait vraiment les comédiens, il ne gueulait pas, vraiment il était toujours très gentil. Je me rappelle de vrais moments de rigolade entre Fernand Ledoux, Gaby Morlaix et Robert Lamoureux qui était un vrai gosse et nous faisait toujours de petits sketchs. Nous étions heureux de tourner, tranquilles et détendus.

 

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Avec toute la troupe dans "Papa, Maman, ma femme et moi" de Jean-Paul Le Chanois (1955)

 

- Que pouvez vous nous dire concernant Louis de Funès ?

- Je me rappelle de la scène lors de laquelle il devait aider ma belle famille à déménager et transportait une armoire. La scène aurait pu être tournée en quelques minutes mais elle a duré toute une matinée. Il arrivait toujours un problème à Louis qui recevait des parpaings sur la tête, des morceaux de bois qui tombait et qui le faisait jurer "Nom de nom je n'arriverai jamais à la tourner cette scène". Il me faisait énormément rigoler dans ces créations et ses mimiques. Je ne crois pas avoir eu d'autres scènes à ses côtés mais je me rappelle très bien de celle-ci. Je n'ai que de bons souvenirs avec Louis de Funès. C'est un acteur qui m'a toujours très bien accueilli lorsque nous étions en contact. Nous avons parlé d'énormément de choses, notamment de syndicats, il était très preneur de ces choses là. Je garde un souvenir charmant de cet homme véritablement exceptionnel. Par la suite rien ne s'est présenté avec lui, même si j'aurais adoré tourné à nouveau avec lui. Je m'entends d'ailleurs très bien avec celle qui fût sa femme au cinéma, Claude Gensac que j'aime beaucoup. La suite de "Papa, Maman la Bonne et moi" , appelé "Papa, Maman, ma Femme et moi", a moins fonctionné que le premier même s'il connût un succès honorable. Le premier avait vraiment tout enlevé, les gens n'en revenaient mais nous étions dans une période assez particulière où tout le monde avait besoin de rire et de s'amuser ! Quant à Le Chanois, j'ai à nouveau tourné sous sa direction dans un film intitulé "Le cas du docteur Laurent".

 

- Un autre acteur fétiche avec lequel vous avez tourné est Lino Ventura dans "L'Aventure c'est l'aventure" et "La Gifle", quels souvenirs gardez vous de lui ?

- Lino était quelqu'un de très timide. Ce que j'ai ressenti à ses côtés c'est qu'il respecte les femmes mais qu'elles lui font un peu peur. Pourtant Lino est incontestablement un homme qui attire les femmes d'où peut être cette timidité. Durant la promotion du film je me rappelle que j'étais la seule femme présente entourée de ces six hommes (Lino Ventura, Charles Gérard, Aldo Maccione, Charles Dener, Jacques Brel et Claude Lelouch) j'avais une petite appréhension c'est vrai (rires) ! Le rôle était petit mais Lelouch m'avait dit que c'était vraiment moi qu'il voulait. Ce n'était pas une composition facile. Je faisais un discours à la Mutualité devant des centaines de prostituées, dont j'étais la représentante, pour réclamer l'assurance sociale à notre égard. Au passage quarante ans après elles n'en bénéficient toujours pas !

 

Avec Isabelle Adjani et Lino Ventura dans "La Gifle" de Claude Pinoteau (1974)

 

- Aujourd'hui quel regard portez vous sur votre carrière ?

- J'ai fait une carrière honorable mais je n'étais pas accro à ce métier. Je n'ai véritablement pris conscience de sa beauté qu'au théâtre. Là je l'ai vraiment respecté. J'ai toujours eu comme fil directeur de convaincre le public, surtout dans les rôles complexes mais j'ai toujours préféré les rôles difficiles. Ma carrière théâtrale a débuté avec "Les sorcières de Salem" et je me suis perfectionnée grâce à Raymond Rouleau qui m'a donné de nombreux conseils. Je le revois encore à me dire "Tu me le mimes mais tu ne me le joues pas". Grâce à lui j'ai compris que l'on pouvait dire "Je t'aime" de dos. Mon seul véritable regret reste de n'avoir pu jouer Zola dans une adaptation cinématographique. René Clément en avait fait une et je l'avais supplié de me prendre en lui disant "Vous ne pouvez pas me faire ça !" mais comme il s'agissait d'une production allemande ils ont finalement choisi une actrice de cette nationalité. Clément m'a appelé et m'a dit qu'il était trop tard, qu'elle avait signé et qu'il ne pouvait plus rien pour moi. Là je me suis vraiment mise à pleurer !

 

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