Cyril FORTHOMME
aaaaaaaaaCyril Forthomme a contribué à la mise à jour spéciale du site consacrée au duo Bourvil-de Funès en partageant ses connaissances. Collectionneur de Bourvil résidant en Belgique, il a fondé un musée sur l'acteur et le chanteur, ouvert à quiconque souhaitant en savoir un peu plus sur l'artiste. Dans cette interview, il nous évoque sa passion, son musée et apporte quelques informations sur Bourvil. Merci à lui pour sa disponibilité et sa gentillesse.
Interview de Cyril Forthomme du 11 septembre 2009 par Franck et Jérôme
- Quand et comment vous est venu cette passion pour Bourvil ? - C'était en 2000, le soir de Noël, lorsque j'ai vu à la télévision la pièce de théâtre "La Bonne Planque" avec Bourvil. J'ai demandé à ma famille le nom de cet acteur que je trouvais fabuleux. Rapidement, j'ai écouté quelques disques de Bourvil que ma grand-mère avait et j'ai lu une première biographie de l'acteur.
- Qu'est ce qu'il vous plait en lui ? - C'était un homme exceptionnel, d'une extrême gentillesse, qui faisait son métier pour le public, pour lui faire passer un bon moment au théâtre ou au cinéma. Au théâtre, lorsque le rideau tombait, il se tournait vers ses partenaires et disait avec soulagement : "ça va, ils sont contents"...
- C'est en agrandissant votre collection que vous est venu l'idée de monter votre "musée Bourvil" ? - Oui, j'ai commencé à collectionner sérieusement sur Bourvil en 2003 et j'ai monté un musée sur lui dans un lieu inoccupé appartenant à ma famille. L'endroit s'appelle "Bourvil ou la tendresse du rire". Au commencement, le musée comprenait une centaine de pièces. Aujourd'hui, il doit avoisiner les 2 000 pièces.
- Quelles sont les pièces les plus originales que l'on peut trouver dans ce musée ? - Il s'y trouve plusieurs documents que Philippe et Dominique Raimbourg, les fils de Bourvil, m'ont remis par l'intermédiaire de Pascal Delmotte, comme du papier à lettre ou des photos de famille. J'ai également une copie de l'acte de naissance, des disques, des autographes et dédicaces de Bourvil et les témoignages écrits de nombreuses personnes qui ont travaillé avec lui.
Cyril parmi quelques pièces de sa collection dans son musée
- Parlons à présent de Bourvil et de sa carrière, notamment de son duo avec Louis de Funès. Ce dernier a tourné pendant quatre jours sur "Poisson d'avril", quelles furent les relations entre les deux hommes ? - Pour être franc, je ne peux en dire grand-chose car nous avons peu de témoignages sur ce film. Il fut tourné en 1954, à une époque où de Funès était encore peu connu car habitué aux seconds rôles, voire à la figuration. L'actrice Jacqueline Noël, qui tournait dans "Poisson d'avril" et que j'ai interviewée, se souvient que les deux acteurs s'entendirent très bien sur ce tournage.
- Lorsque "Le Corniaud" fut tourné à l'automne 1964, de Funès s'apprêtait à devenir une énorme vedette comme Bourvil, avec les sorties du "Gendarme de Saint-Tropez" et de "Fantômas". A l'inverse, lorsque sortit "La Grande Vadrouille", certains critiques considérèrent presque Bourvil comme un second rôle efficace face à un de Funès au mieux de sa forme. Comment Bourvil a-t-il évalué l'apport du duo qu'il a formé avec Louis de Funès ? Croyez-vous qu'il se sentit doublé ? Est-il exact que, malgré l'insistance du producteur Dorfmann, Bourvil n'aurait pas immédiatement souhaité rejouer avec de Funès ? - Dans une interview réalisée pendant le tournage de "La Grande Vadrouille", Bourvil disait en blaguant à son partenaire : "C'est mon dernier tournage avec vous, Monsieur de Funès". Ce fut le cas malheureusement. Mais je doute qu'il ait eu peur de l'ascension de De Funès. Il aimait jouer avec de grands partenaires, notamment avec lui et aimait également que tout le monde puisse avoir sa chance de réussir dans ce métier.
- Quoi qu'il en soit, 1969 a vu la naissance d'un nouveau duo conçu par Gérard Oury : Bourvil-Belmondo. - Il faut préciser que Bourvil avait déjà travaillé avec Belmondo en 1958 dans "Un Drôle de Dimanche". Oury connaissait Belmondo depuis cette époque et a rapidement pensé à lui pour "Le Cerveau". Belmondo dit qu'il garde "de très bons souvenirs" à propos de ce tournage car il calquait (tout comme Salvatore Adamo dans "Les Arnaud" en 1967) le jeu que Bourvil lui montrait avant le tournage d'une scène. Belmondo considère aujourd'hui "Le Cerveau" comme un chance dans sa carrière, car il a pu apprendre avec Bourvil, comme il a également appris avec Arletty ou Danièle Darrieux.
- Comment définiriez vous l'apport du jeu de Bourvil sur deux films comme "Le Corniaud" et "La Grand vadrouille" ? - Oury avait très bien trouvé le rôle pour Bourvil. On sent en regardant le film qu'il avait écrit le rôle exprès pour lui. Avec Bourvil, on passait en cinq minutes du rire aux larmes, c'était le talent de l'acteur. D'ailleurs, 40 ans après, ça marche toujours !
- Au regard de la qualité des deux films de Oury, n'est-il pas un peu réducteur de considérer uniquement "La Traversée de Paris", "Les Grandes Gueules" et "Le Cercle Rouge" comme les grands films de Bourvil, sous prétexte qu'il jouait des rôles inhabituels à son registre ? - Non car il a eu d'autres bons rôles, dès ses premiers films. En 1946, il joua dans "Pas si bête" de Berthomieu, son premier film en tant que vedette et son deuxième dans sa filmographie (son premier étant "La Ferme du Pendu" de Jean Dréville en 1945 où son passage dure en tout et pour tout 3 minutes en interprétant la chanson "Les Crayons"), dans lequel il se montre très bon. Aujourd'hui, il est difficile à croire que ce genre de films pouvait sortir à l'époque. Mais il faut se replacer dans le contexte. Il s'agissait de la fin de la Seconde Guerre mondiale et le public avait avant tout envie de rire. De plus, Bourvil a eu cette chance qu'on ai pu lui faire tourner un peu de tous les genres que ce soit du comique ou du tragique pour le cinéma mais aussi du tendre pour ses chansons et l'opérette au début de sa carrière.
Bourvil sur le tournage du "Corniaud", avec Louis de Funès pour célébrer le succès de leur duo, et sur le tournage des "Cracks".
- Bourvil aurait dû retrouver Louis de Funès dans "La Folie des Grandeurs". Sa disparition prématurée rendra impossible la nouvelle réunion des deux acteurs. Avez-vous eu des échos quant à l'esprit de Bourvil pendant sa préparation pour le tournage ? Etait-il satisfait du scénario et ravi de retrouver de Funès ? - Bourvil avait effectivement accepté de tourner avec Oury et de Funès dans "La Folie des Grandeurs". Le contrat était signé. Toutefois, Bourvil avait dit à sa femme : "tu iras rendre l'argent à la Gaumont". Cela montre qu'il était désintéressé par l'argent et aussi qu'il souhaitait garder secrète sa maladie. C'était pour n'éveiller aucun soupçon qu'il acceptait de s'engager pour de nouveaux films, même s'il savait pertinemment qu'il ne pourrait pas les tourner.
- Pensez-vous que l'accident de vélo survenu au cours du tournage des "Cracks" a accéléré la disparition de Bourvil ? - Le frère de Bourvil m'a parlé de cet accident. Il aurait été renversé sur le tournage et serait tombé de vélo dans un fossé. Il m'a dit que Bourvil était déjà malade, avant le tournage des "Cracks". Mais il n'est pas impossible que cet accident ait accéléré sa maladie (nous n'en sommes pas sûr).
- Quels souvenirs de leur père gardent Dominique et Philippe Raimbourg ? - Très bons, car ils ont tout de même connu leur père pendant 17 et 20 ans. Ils considèrent aujourd'hui cette relation comme une expérience formidable. Mais à la maison, Bourvil faisait la part des choses. Il parlait un peu de tournage mais faisait de la famille une priorité. D'ailleurs, il réservait chaque année son mois d'août pour passer des vacances en famille en Normandie.
- Que ce soit en DVD, en CD ou en livre, est-ce que Bourvil se vend encore bien ? - Bourvil est encore fort recherché par ses nombreux fans. Les objets d'occasion se vendent bien. Mais les objets neufs en magasin se vendent correctement également.
- Un petit conseil pour ceux qui souhaitent en apprendre un peu plus sur Bourvil : quelle biographie conseilleriez-vous ? - Probablement "C'était bien" de Gérard Lenne, sorti en 2000. Sa carrière y est bien résumée. Mais, à ce jour, il n'existe aucune biographie absolument parfaite. Tous les travaux déjà parus comportent quelques inexactitudes. Certains biographes confondent ses dates de naissance et de décès. Il a été dit qu'il était né un 22 juillet mais, en réalité, il était du 27 juillet 1917. Actuellement, Pascal Delmotte, qui gère aujourd'hui le patrimoine de Bourvil, prépare une biographie très importante. Il est en relation avec les enfants de Bourvil et a notamment épluché les archives de famille.
Bourvil et Jean Gabin dans "La Traversée de Paris", tourné en 1956 sous la direction de Claude Autant-Lara (collection F&J).
- Enfin, pouvez vous nous donner quelques mots sur l'Association des Amis de Bourvil ? - Elle fut créée en 2003 par des passionnés, qui habitent pour la plupart en Normandie, sa présidente actuelle est Sophie Capron. En 2005, elle commémora le 35ème anniversaire de la disparition de Bourvil, en 2007 elle fêta le 90ème anniversaire de Bourvil et en 2009, les membres ont ressorti de vieilles bicyclettes et de vieux costumes pour parodier "Les Cracks". Le but est de ne pas oublier Bourvil. C'était l'une des grandes peurs de ce dernier qui pensait que, des années après leur disparition, les acteurs étaient oubliés par le public.
Contacts : - Association "Les Amis de Bourvil", Mme Sophie Capron, 25 rue Fred Money, 76 740 Crasville-la-Roquefort, 02 35 97 48 16 - Musée "Bourvil ou la tendresse du rire...", M. Cyril Forthomme, Rue Toffaite 5, 6440 Boussu-lez-Walcourt, Belgique
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