Bernard LAVALETTE

1ère partie - 2ème partie

 

AAAN L'excellent comédien Bernard Lavalette nous avait déjà accordés un entretien en 2007. Bien évidemment, il avait longtemps été question du film de Robert Dhéry "La Belle américaine", où il tient probablement le rôle le plus marquant de sa carrière. Cinq ans plus tard, après être restés en contact avec lui, nous avions envie d'évoquer sa carrière, qu'il a notamment rédigée dans ses mémoires "Et à part ça, qu'est ce que vous faites ?" (Editions de Fallès). Une fois encore, cet homme adorable s'est montré d'une grande gentillesse et nous a invités chez lui pour une entrevue qui vous est ici reproduite intégralement. Un grand merci à Bernard Lavalette, qui est un acteur formidable et un homme charmant.

 

Interview de Bernard Lavalette du 11 février 2012 par Franck et Jérôme
pour Autour de Louis de Funès

 

- M. Lavalette, votre véritable identité est Bernard de Fleury, pourquoi avoir opté pour le nom d'artiste de Lavalette ?

- C'est mon ami Pierre Tchernia qui l'a trouvé. A cette époque nous n'avions que 18 ou 19 ans et nous étions en vacances au château de Villebois-Lavalette dont Maurice de Fleury, mon grand-père, membre de l'Académie de médecine, s'était porté acquéreur en 1914. Je devais monter me produire en Normandie et à table, mon père me demanda pour quel nom d'artiste j'allais opter. Pierre Tchernia eût alors l'idée : "Je vais m'appeler Pierre Villebois et toi Bernard Lavalette". Je lui répondis qu'il n'avait pas besoin de s'appeler Vilebois puisque son nom original, Tchernia, était très bien mais j'optai pour le pseudonyme de Lavalette. C'est donc Pierre Tchernia qui m'a baptisé.

 

- Quels souvenirs gardez-vous de vos débuts professionnels dans les cabarets de la rive gauche, puis de la rive droite ?

- Vous me parlez d'une époque lointaine (rires). Concernant la rive gauche, j'ai un jour été invité par un club d'artistes amateurs à chanter pour accompagner le piano. J'ai sélectionné des chansons que j'aimais bien, notamment des Frères Jacques, plus deux ou trois chansons dont j'étais l'auteur. Dans la salle il y avait Anne Marie Carrière qui a retenu mon nom et m'a invité à la rejoindre dans un théâtre du quartier latin où elle se produisait. J'ai véritablement débuté ici.

 

- Vous avez fréquenté des établissements célèbres. Que pouvez-vous nous dire des Trois Baudets ?

- J'ai moins de souvenirs des Trois Baudets où j'ai dû faire une centaine de représentations. Je me suis en revanche beaucoup plus produit au théâtre de Dix Heures, pendant environ 5 ans si mes souvenirs sont bons. J'ai aussi travaillé à l'Ecluse sur la rive gauche.

 

- A cette époque était-il facile de rentrer dans la vie artistique ?

- J'ai auditionné au théâtre de Dix Heures devant le directeur qui m'a dit "Je vous donnerai des nouvelles". Trois mois après sa secrétaire m'appelait pour me dire que je débutais chez lui. Il y avait un programme formidable avec de véritables talents et notamment Anne Marie Carrière dont je vous ai déjà parlé. Il devait y avoir cinq ou six chansonniers. J'ai débuté le premier jour en chantant en 1, le second jour en chantant en 2, le troisième en 3 et après j'ai débuté vraiment au mois d'août en vedette américaine.

 

- Votre carrière au cinéma remonte à "Sans Famille" d'André Michel en 1957, comment se sont déroulés vos débuts sur un plateau ?

- J'avais une scène à tourner où j'interprétais un facteur mais je n'en ai pas de souvenirs précis. Tout cela est vraiment très lointain et de plus je n'ai pas beaucoup tourné au cinéma.

 

- Vous avez en revanche beaucoup travaillé au théâtre, Est-ce selon vous la meilleure école pour apprendre le métier ?

- Oui bien sûr je pense mais ma formation reste vraiment le cabaret dans lequel j'ai évolué pendant 10 ans : Théâtre de Dix Heures, Caveau de la République, Les Trois Baudets. Au fil du temps j'ai modifié mon tour de chant pour en garder un maximum d'efficacité. J'étais demandé dans tous les galas étudiants et non étudiants de France et de Navarre.

 

- Vous revendiquez donc l'étiquette de chansonnier ?

- Tout à fait. Et c'est parce que je faisais du cabaret que l'on m'a demandé de jouer un rôle au Palais Royal dans une comédie qui a d'ailleurs très bien marché.

 

- Votre première performance théâtrale est la pièce "Les lingots du Havre" d'Yves Jamiaque en 1956...

- Yves Jamiaque était un auteur génial qui avait écrit une pièce magnifique, hélas éreintée par certains critiques. Nous avions tous des rôles importants dans cette pièce.

 

- Vous avez côtoyé de grands professionnels du Théâtre. Quels sont vos souvenirs concernant Raymond Rouleau ?

- Il a fait la mise en scène au théâtre de la Madeleine de "Une fille dans ma soupe" avec Pierre Mondy notamment. Ca ne s'est pas très bien passé au début. Peut-être avais-je le trac ou je ne trouvais pas vraiment le personnage, toujours est-il que j'étais obligé d'aller demander des conseils à Pierre Mondy. Il m'a très bien expliqué et je suis rentré dans l'axe que souhaitait Raymond Rouleau. Je me suis du reste beaucoup amusé dans cette pièce avec Pierre qui est un vrai marrant.

 

- Et Jean Le Poulain ?

- Oui j'ai travaillé avec lui en 1972 au théâtre Montparnasse dans une pièce totalement folle qui s'appelait "Le saut du lit" que j'ai notamment jouée avec Micheline Boudet et Guy Tréjan. Ce fût un succès inattendu puisque la pièce qui devait se jouer juste après la nôtre a dû trouver un autre théâtre afin de nous laisser continuer. Je ne me souviens plus du nombre exact de représentations, peut être aux alentours de 400.

 

Avec Robert Dhéry dans "La Belle américaine"

 

- En 1981, vous vous produisez dans un one-man show, comment est né ce projet ?

- C'était au théâtre de la Tête d'Or. J'ai eu l'idée de proposer un spectacle hommage à Brassens. Je l'ai connu au music-hall, j'ai fait des tournées avec lui. C'était un homme que j'admirais profondément dont la mort a été un chagrin personnel pour ma femme et moi. Nous avions perdu un ami et un véritable poète de la chanson. Je me suis donc produit pendant un long moment et ce fût un beau succès auprès du public et de la presse.

 

- Gardez-vous une préférence pour le théâtre ?

- Oui bien sûr j'adore le théâtre. Jouer en scène tous les soirs, c'est surtout essayer de faire un progrès tous les soirs tandis que le cinéma il faut y aller de bonne humeur mais uniquement sur quelques jours.

 

- Etes-vous à l'aise dans l'improvisation ?

- En principe il n'y a pas d'improvisations au théâtre. Ce ne se fait pas, on se doit de respecter le texte sauf en cas d'imprévu. Cela m'est notamment arrivé au théâtre du Châtelet lorsque je jouais dans "L'auberge du cheval blanc". Il y a eu un problème un soir : il y avait une femme au premier rang qui commentait à voix haute le texte et qui chantait les airs avec nous. Je m'en suis aperçu au bout d'un moment et tout en chantant j'ai réussi à la localiser dans la salle. En deuxième partie elle a chanté en même temps que le jeune premier qui chantait sur son bateau avant de se lever, de faire le tour de la scène et d'emprunter l'escalier pour monter nous rejoindre. Elle s'est alors assise sur le bateau ce qui a provoqué un mouvement de panique. On a hissé le bateau en coulisse et le directeur de scène est venu voir cette dame en lui demandant ce qu'elle faisait ce à quoi elle répondit : "Je vais à la mer". Nous avons vite compris qu'elle était folle. Il a fallu contacter son asile mais elle ne voulait pas partir et tenait absolument à voir la fin de la pièce. Une fois le rideau baissé, elle est repartie encadrée par deux infirmiers.

 

- Les pièces dites "de boulevard" ont-elles une connotation péjorative dans ce milieu professionnel ?

- Je ne saurais pas vous dire mais elles sont très intéressantes à interpréter car plus difficiles qu'une pièce dramatique. J'ai eu moins de mal à jouer ces dernières que des pièces comiques qui ne trouvent un équilibre qu'au bout de quelques représentations.

 

- Reparlons un peu du film "La Belle Américaine", est-ce Tchernia qui vous a proposé le rôle du ministre ?

- Lorsque Dhéry a fait la distribution de son film, je devrais d'ailleurs dire de "leur film" puisqu'il s'agissait de la troupe des Branquignols et de Tchernia, coauteurs et coréalisateurs, il engage Poiret et Serrault. Poiret dans le rôle du ministre et Serrault dans le rôle qu'il a joué. Au dernier moment, Poiret lui téléphone pour lui dire qu'il est retenu sur un autre film et qu'il ne pourra venir travailler avec eux. Tchernia me demande si je peux alors reprendre le rôle mais j'ai demandé comme condition de pouvoir continuer à me produire tous les soirs au théâtre du Châtelet.

 

- Quels souvenirs gardez-vous de l'ambiance plateau avec eux ?

- Un souvenir enchanteur et enchanté. C'était une équipe magnifique emmenée par Robert et sa bande de copains. C'est pour moi un souvenir prodigieux d'amitié, de simplicité et de gaieté dans le travail. Il s'agit sans aucun doute d'un de mes plus beaux souvenirs de tournage.

 

- Est-ce à cette occasion que vous avez rencontré Louis de Funès ?

- Non, je l'avais rencontré quelques temps auparavant. J'étais dans une salle de spectacle où il jouait sur scène et j'étais allé le saluer à l'issue de la représentation. Il m'a dit "Ce serait bien que l'on puisse travailler ensemble un jour". Il m'avait demandé pour un film où j'avais interprété un petit rôle puis je l'ai de nouveau rencontré sur le tournage de "La belle américaine". A cette époque il était déjà une vedette intéressante puisque Tchernia et Dhéry lui ont donné un double rôle. Selon eux le premier rôle n'était pas assez important, ils lui ont donc crée le rôle du frère jumeau policier qui apparait à la fin.

 

Avec Bernard Dhéran, Louis de Funès et Robert Dhéry dans "La Belle américaine"

 

- Comment se déroulait le travail quotidiennement ?

- Il y avait un échange constant entre Dhéry et Tchernia. Quand l'un était devant la caméra, l'autre était derrière. Chacun prenait à tour de rôle la direction du film. Il y avait ambiance de fraternité et d'amitié. L'humour était constamment présent.

 

- Est-ce que tous les membres de la troupe des Branquignols pouvaient apporter un gag ou une idée ?

- Non, car le scénario état très bien écrit. Le film avait été travaillé depuis de nombreuses années, notamment en louant un appartement spécial à Paris pour ne pas être dérangé par la vie quotidienne.

 

- Quel souvenir gardez-vous du travail de Louis ?

- Je ne me rappelle pas d'improvisations. Quand il avait fini de tourner il retournait dans sa loge. Il était très préoccupé par son rôle et ne se laissait pas distraire. Il ne montrait pas son angoisse mais elle était perceptible. Il travaillait dans un cadre très précis, il ne fallait pas en sortir. Je me rappelle un homme très gentil mais aussi très renfermé sur lui-même, qui réfléchissait beaucoup à ce qu'il faisait. Il s'exécutait toujours de manière très consciencieuse, il ne fallait pas le déranger. J'ai aussi tourné dans "Le Gendarme se Marie" où Girault m'avait engagé. Je le connaissais bien puisque nous jouions dans le même club de tennis et par la suite j'ai fait quelques-uns de ses films.

 

- Quelles furent les critiques lors de la sortie de "La Belle Américaine" ?

- Formidables ! On a eu une projection dans un cinéma des Champs Elysées où nous sommes tous allés. La presse a beaucoup ri et semblait visiblement enthousiaste. Le film a fait des millions d'entrée sur Paris.

 

- C'est à partir de ce rôle que vous avez été catalogué aux rôles mondains ?

- Oui comme le film fût un gros succès le milieu m'a vite catalogué dans ce genre de personnages. J'ai interprété des ministres, des sénateurs…Cela prouve aussi le manque d'imagination des metteurs en scène. Il est vrai que cette étiquette a parfois été un peu pesante mais je ne vais pas me plaindre.

 

- Parlons de Brassens, à quand remonte votre première rencontre ?

- Un soir j'ai été invité par Patachou dans le cabaret qu'elle dirigeait et où elle se produisait. Je m'y suis rendu et à la fin de son tour avec l'orchestre elle a dit "Mesdames, Messieurs, je viens de chanter deux ou trois chansons de Georges Brassens qui est encore un inconnu. Je vais l'appeler afin qu'il en interprète d'autres. Ceux qui veulent partir peuvent, ceux qui veulent rester sont les bienvenus". Brassens est entré hésitant, marchant un peu comme un malheureux qui va aux abattoirs. Il allait chanter sur scène ce qui est un exercice difficile. Il a chanté et j'ai été bouleversé. Je suis allé le trouver dans une sorte de loge en sous-pente où je lui ai fait part, très maladroitement d'ailleurs, de mon admiration. Il a été adorable avec moi. Je l'ai retrouvé quelque temps après dans un studio où moi aussi je chantais. Je me suis alors dit que je ne m'étais pas trompé et qu'il était vraiment une grande vedette.

 

- Comment s'est déroulé le travail durant les tournées avec lui ?

- Je l'écoutai chanter tous les soirs. Je me mettais dans un coin du plateau et j'étais chaque soir enchanté. Je le revois d'ailleurs lorsqu'il se tournait vers son célèbre accompagnateur à la basse. J'étais tout le temps proche de lui et à chaque fois ce fut un grand moment d'émotion. Une seule fois, je n'ai pas assisté à sa représentation. J'étais sorti me promener en ville et j'ai vu, à mon retour, les gens sortir beaucoup plus tôt que prévu. Un spectateur me dit "Votre ami Brassens, ce n'est pas un drôle, il se fout vraiment de nous, il est parti !". J'ai rejoint les coulisses où Brassens se trouvait en lui demandant ce qui s'était passé, ce à quoi il me répondit : "Ils ne sont pas gentils avec moi et je ne veux pas les embêter". Il a donc arrêté son tour plus tôt. Je me souviens qu'il venait chaque soir très tôt au théâtre et qu'il s'échauffait les doigts sur sa guitare. Il y avait un humoriste qui passait en numéro un et un soir il y a un couple qui est arrivé en retard. Comme il est de tradition, l'artiste l'a mis en boite, ce qui a provoqué une réaction violente du directeur en coulisses qui a reproché d'avoir insulté le préfet ! Le directeur l'a vraiment engueulé de façon brutale et alors Brassens l'a empoigné très fortement par les épaules en lui disant "Vous n'êtes pas ici chez vous mais chez les artistes". Il l'a fait tourner et l'a véritablement poussé dans la salle. C'est vous dire à quel point Brassens était proche de ses amis artistes.

 

- Lorsque vous vous retournez sur votre carrière, êtes-vous nostalgique de ce que vous avez vécu ?

- Non, j'ai hélas eu des problèmes de santé qui m'ont obligé à arrêter ce qui me fait mal mais mon état d'esprit a tellement changé depuis que je ne regrette rien en définitive. Je n'ai pas eu beaucoup de mauvaises critiques, peut être une ou deux mais j'en ai aussi eu de très bonnes. J'en ai eu une excellente à Grenoble où l'on m'a encensé au détriment de la vedette. Elle n'a rien dit en tous les cas (rires).

 

- Quel est votre plus beau souvenir de carrière ?

- Peut-être la rigolade lors de "40 carats". A l'époque venait tous les soirs un chef pompier pour surveiller si le pompier habituel en charge de la sécurité faisait correctement son travail. Ce soir-là le chef pompier se met derrière la porte sans savoir qu'elle allait s'ouvrir. Elle a été ouverte par un comédien qui sortait de scène puis Françoise Fleury disait "Un homme comme ça ne vous plairait pas ?" en montrant du doigt la direction de la porte où se trouvait désormais le chef pompier. Elle éclate de rire et nous avons tous suivi.

 

- Un artiste gravé à jamais dans votre mémoire ?

- Il y en a deux sans hésitation : Brassens et Tchernia.

 

- Vous avez relaté vos souvenirs professionnels dans un livre autobiographique, comment est née cette envie ?

- J'en ai eu envie un jour. Je me suis assis à ma table et j'ai commencé à écrire. Je me suis laissé prendre au jeu et j'ai continué. Je suis arrivé à plus de trois cent pages en me disant qu'il était peut-être temps de m'arrêter (rires).

 

 

- Comme beaucoup d'acteurs, avez-vous connu les films purement alimentaires ?

- Non, puisque en parallèle, je jouais tous les soirs au théâtre ou je me produisais au cabaret. Honnêtement, je gagnais très bien ma vie ce qui m'a permis d'éviter ce genre de films.

 

- La réalisation vous a-t-elle déjà intéressée ?

- Non jamais et je ne saurai pas du tout faire. Je n'ai jamais écrit une ébauche de scénario, ce n'est pas ce qui m'intéressait.

 

- Comment travailliez-vous vos personnages ?

- J'apprends mon texte par cœur et j'essaie de comprendre le rôle et de m'y adapter. Je pense que c'est suffisant. Le personnage évolue jusqu'à ce que je le tienne bien. Il y a peu de problèmes en règle générale si ce n'est la possibilité, qui m'est déjà arrivée, d'un trou de mémoire. Sur scène je pense qu'il faut avant tout être sincère, c'est une qualité essentielle pour être un bon comédien.

 

- Puisez-vous à la fois dans le vécu et dans l'imaginaire ?

- Non, pas dans le vécu. Dans la composition on n'est jamais le personnage. On peut jouer un salaud sans en être un. Vous devez en revanche vous laissez guider par ce personnage. C'est lui qui vous commande. Mais sorti du studio ou du théâtre tout retombe, on ne reste jamais dans la peau de ce personnage.

 

- En dehors du travail, quel homme privé est Bernard Lavalette ? Détendu ou angoissé ?

- Je ne suis pas angoissé. Je ne j'ai jamais eu d'inquiétudes ou de doutes sur la possibilité de jouer un rôle. Même pour un rôle dramatique ou vous devez aborder une composition différente, je devais foncer, je n'avais pas le choix il fallait que je joue la situation tout simplement.

 

- Le milieu a-t-il beaucoup évolué ? Les relations entre acteurs ont-elles changé ?

- Je n'ai pas le sentiment d'avoir vécu des époques différentes du point de vue cinématographique. A l'époque j'ai joué dans un film où Fernandel était la vedette et il fût adorable avec moi. Nous tournions le premier soir à Rouen où la neige était tombée ce qui compliquait beaucoup le niveau du son et de l'image. Le régisseur est venu me chercher pour rencontrer Fernandel qui m'avait fait demander. Il m'a dit "Je sais que vous avez fait du music-hall". Comme lui aussi en était issu je gagnai son amitié et sa confiance. Sur le plateau lorsqu'il devait me frapper il me disait toujours "Je vous fais mal, Lavalette ?". Il a été d'une chaleur et d'une gentillesse inouïe. Mais tourner avec une plus jeune génération d'acteurs est aussi très plaisant.

 

- Théâtre, cinéma, télévision, doublage, vous avez pris plaisir à varier les facettes qu'offrait votre métier ?

- Oui c'était très amusant de se lever le matin pour aller faire un doublage de voix, notamment pour les Astérix. D'ailleurs pour ce dessin animé, l'originalité était la suivante : nous enregistrions d'abord les voix et c'était le dessinateur qui dessinait d'après nos voix. Cet exercice était très plaisant. Je travaillais avec Roger Carel et avec Pierre Tornade qui sont deux amis magnifiques. Tchernia aussi participait beaucoup, il était un grand ami d'Uderzo.

 

- Est-il compliqué, d'abord d'entrer, puis de durer dans le métier ?

- D'entrer je n'ai pas eu de mal, j'ai très peu auditionné et j'ai vite débuté au théâtre de Dix Heures. J'ai suivi les demandes, j'acceptai ou je refusai mais tout s'est bien déroulé dans la continuité. Je n'ai pas été un carriériste, j'ai suivi les demandes. Je me considère comme un acteur chanceux. Je suis toujours un peu le métier. Je constate que le cinéma d'aujourd'hui est un peu trop rapide à mon sens, mais peut-être est-ce moi qui vieillit ! Aujourd'hui le métier me manque mais je ne compense pas ce manque, je vis très heureux avec ma femme, qui durant ma carrière m'a fait répéter chaque rôle que j'apprenais, cela me convient parfaitement. J'ai aujourd'hui 86 ans et il était temps de s'arrêter.

 

 

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